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Sinistre et vétusté : comment éviter de perdre des milliers d’euros ?

Lors d’un sinistre, la vétusté devient souvent un argument-clé des assureurs pour réduire l’indemnisation. Mais cette notion, loin d’être automatique, soulève des débats techniques et juridiques qui peuvent faire toute la différence entre une réparation équitable et une perte financière lourde.

Qu’est-ce que la vétusté, vraiment ?

La vétusté est un terme fréquemment utilisé dans le monde de l’assurance, mais rarement expliqué en profondeur. Elle désigne la perte de valeur d’un bien due au temps qui passe, à l’usure normale ou à l’obsolescence technologique. Autrement dit, un bâtiment, une toiture, une chaudière ou encore un meuble n’ont plus, au jour du sinistre, la même valeur qu’au premier jour de leur installation ou de leur achat.

Dans la pratique, les experts distinguent généralement deux notions :

    • La valeur à neuf : le coût nécessaire pour remplacer le bien sinistré par un bien équivalent, neuf et conforme aux standards actuels.

    • La valeur réelle (ou valeur d’usage) : la valeur à neuf, diminuée d’un pourcentage représentant la vétusté.

C’est cette différence qui, dans le cas de certains sinistres, peut représenter plusieurs dizaines de milliers d’euros d’écart dans l’indemnisation finale.

Si la définition semble claire, la mise en œuvre l’est beaucoup moins. Car la vétusté n’est pas une vérité universelle ou figée : elle varie en fonction de multiples critères tels que l’âge du bien, son état d’entretien, la qualité initiale des matériaux, ou encore la durée de vie moyenne attendue de l’objet. Et c’est précisément dans cette zone d’incertitude que se jouent la plupart des débats entre assureurs, experts, avocats et assurés.

contre expertise de la vétusté d'une habitation en Belgique

Pourquoi la vétusté pèse si lourd dans une indemnisation ?

Derrière le mot technique de vétusté se cache une réalité très concrète pour l’assuré : une réduction parfois drastique du montant versé après sinistre. Pour l’assureur, appliquer un taux de vétusté est un moyen de limiter son engagement financier. Pour l’assuré, cela se traduit par une perte sèche.

En Belgique, la plupart des contrats d’assurance habitation prévoient une indemnisation en valeur à neuf. Cela signifie que, tant que la vétusté d’un bien reste inférieure ou égale à 30 %, l’assureur indemnise le remplacement du bien comme s’il était neuf, sans appliquer de réduction.

En revanche, au-delà de 30 % de vétusté, la part excédentaire peut être déduite de l’indemnité. C’est souvent à ce stade que les écarts financiers deviennent significatifs.

Prenons un exemple concret :

    • La toiture d’une habitation doit être remplacée pour un montant de 50.000 €

    • L’expert de l’assurance estime la vétusté à 45 %

    • Les 30 premiers pourcents sont pris en charge en valeur à neuf

    • Les 15 % restants (au-delà du seuil contractuel) sont déduits, soit 7.500 € laissés à charge de l’assuré !

Dans cet exemple, la différence de 7.500 € reste à charge de l’assuré. Dans certains dossiers, ce décalage peut atteindre des dizaines de milliers d’euros, voire compromettre la possibilité même de remettre le bien en état.

Ce qui rend la question encore plus sensible, c’est que la détermination du taux de vétusté n’est pas une science exacte. Faut-il appliquer 20 %, 40 %, ou 60 % ? Cela dépend de l’interprétation de critères tels que :

    • l’âge du bien ;

    • sa qualité initiale ;

    • les travaux d’entretien réalisés ;

    • ou encore sa durée de vie présendue.

Or c’est justement cette marge d’appréciation qui ouvre la porte à des divergences importantes entre l’expert de l’assurance et l’expert de l’assuré.

contre expertise de la vétusté d'une chaudière

Le droit belge et la réparation intégrale

Derrière les calculs de vétusté se trouve un principe fondamental du droit belge : la réparation intégrale du dommage. Ce principe impose que la victime d’un sinistre soit replacée, autant que possible, dans la situation où elle se trouvait avant l’événement.

En pratique, cela signifie que l’indemnisation ne peut pas être amputée de manière arbitraire. Toute réduction doit être justifiée par un lien clair entre l’état antérieur du bien et l’ampleur du dommage.

La règle des 30 %

Comme vu précédemment, les polices d’assurance incendie destinées aux particuliers prévoient généralement une indemnisation en valeur à neuf, avec un seuil de 30 % de vétusté. En deçà, aucune réduction n’est appliquée. Au-delà, seule la partie excédentaire peut être déduite.
Cette règle contractuelle vise à protéger l’assuré… mais son application concrète dépend de l’évaluation du taux de vétusté, bien souvent sujette à subjectivité et interprétation.

La jurisprudence récente

La Cour de cassation a rappelé à plusieurs reprises que la vétusté ne pouvait pas être utilisée comme prétexte automatique pour réduire une indemnisation :

    • Arrêt du 17 septembre 2020 : la Cour a cassé une décision qui appliquait un pourcentage de vétusté sans démontrer de lien causal avec le sinistre.

    • Arrêt du 2 mars 2022 : la Cour a confirmé cette ligne, précisant que la vétusté ne justifie pas en soi une réduction d’indemnité si elle n’est pas rigoureusement démontrée.

Ces arrêts illustrent que la vétusté est une notion relative, qui doit toujours être appréciée dans le contexte bien spécifique du sinistre, du contrat et des éléments de preuve disponibles.

expertise de la vétusté d'une volée escaliers
estimation vétusté

Quand la vétusté peut-elle être retenue ?

Si la vétusté est une notion incontournable en assurance, elle ne s’applique pas de façon systématique. Tout dépend de la situation, du type de bien endommagé, de la manière dont le contrat d’assurance est rédigé, et plus encore de la façon dont celui-ci est interprété.

Les cas légitimes

La déduction de vétusté peut se justifier lorsque :

    • le bien a largement dépassé sa durée de vie normale, par exemple une chaudière de plus de 25 ans ou une toiture en ardoises artificielles posée depuis 40 ans ;

    • l’entretien est manifestement insuffisant, avec un état de délabrement constaté avant le sinistre ;

    • l’obsolescence est avérée, comme un appareil électroménager ou électronique dont la technologie est dépassée et qui ne peut plus être remplacé à l’identique.

Les cas contestables

À l’inverse, il est possible de contester la vétusté lorsque :

    • le taux appliqué ne repose sur aucune preuve objective, mais uniquement sur une estimation unilatérale et arbitraire de l’expert d’assurance ;

    • le lien entre vétusté et dommage n’est pas démontré : une toiture ancienne bien entretenue peut tout à fait être indemnisée à neuf si le sinistre n’est pas lié à son âge ;

    • le barème utilisé est générique et ne tient pas compte de la qualité réelle du bien (ex. : appliquer le même pourcentage de vétusté à une menuiserie bas de gamme et à une menuiserie sur mesure haut de gamme).

La zone grise

C’est dans les cas intermédiaires que naissent les débats :

    • Quelle vétusté retenir pour une installation en bon état d’entretien, mais ancienne ?

    • Comment traiter des matériaux dont la durée de vie dépend fortement de leur usage ou de leur environnement (bois, toitures, équipements techniques) ?

    • Jusqu’où un barème peut-il s’appliquer sans étude individualisée ?

Ces zones d’incertitude sont souvent le cœur des discussions lors des expertises contradictoires. Elles montrent que la vétusté n’est jamais une donnée purement mécanique, mais une interprétation qui peut être discutée, défendue et parfois renversée.

contre expertise de la vétusté en toiture

Les pièges pour l’assuré

Dans la pratique, la vétusté devient souvent un terrain glissant pour les particuliers. Plusieurs facteurs expliquent pourquoi tant d’assurés acceptent des indemnisations réduites sans les contester :

1. Des clauses contractuelles complexes

Les contrats d’assurance prévoient différentes modalités d’indemnisation :

    • valeur à neuf,

    • valeur réelle,

    • valeur d’usage.

Derrière ces termes techniques se cachent des différences majeures d’indemnisation. L’assuré, souvent peu familier avec ce vocabulaire, ne mesure pas toujours l’impact concret d’une clause qui semble anodine.

2. Une expertise présentée comme vérité absolue

Lorsqu’un expert mandaté par la compagnie établit un taux de vétusté, beaucoup d’assurés pensent que ce chiffre est objectif et incontestable. En réalité, il s’agit d’une appréciation qui peut varier sensiblement d’un expert à l’autre, en fonction des critères retenus.

3. Une acceptation trop rapide

Face à l’urgence financière après un sinistre, certains assurés acceptent la première proposition d’indemnisation pour “tourner la page”. Ils découvrent parfois trop tard qu’ils ont laissé passer une petite fortune à laquelle ils pouvaient pourtant prétendre en toute légitimité.

4. La sous-estimation de l’entretien réalisé

Un bien ancien, mais régulièrement entretenu ou rénové, ne peut pas être assimilé à un bien vétuste. Or, en l’absence de factures ou de preuves tangibles, les travaux passés sont rarement valorisés dans le calcul.


En résumé : l’assuré est désavantagé par une asymétrie d’information et par la technicité des dossiers. Sans un accompagnement professionnel, il risque de voir ses droits réduits de manière injustifiée, sans même s’en rendre compte.

L’expertise contradictoire, un contrepoids indispensable

La détermination du taux de vétusté n’est jamais purement mathématique : elle repose sur une appréciation technique, juridique et parfois subjective. C’est précisément ce qui justifie l’importance d’une expertise contradictoire.

Un équilibre face à l’expert de compagnie

L’expert mandaté par l’assureur agit dans le cadre d’une mission confiée par la compagnie. Même s’il doit rester impartial, il se réfère généralement aux barèmes et aux instructions internes de celle-ci.
À l’inverse, l’expert d’assuré intervient exclusivement dans l’intérêt des  sinistrés. Sa mission est de vérifier, de questionner et de contester lorsque l’application de la vétusté semble abusive ou disproportionnée.

Concrètement, que fait l’expert d’assuré ?

    • Analyse du contrat : vérifier si l’indemnisation doit se faire en valeur à neuf, réelle ou d’usage.

    • Réclamation technique : l’expert de sinistré établit la réclamation technique de l’assuré à travers la rédaction d’un état des pertes précis et chiffré.
    • Justifications techniques : fournir à l’expert de compagnie les explications techniques nécessaires à l’application d’un pourcentage de vétusté adapté (et favorable à l’assuré).

    • Apport de preuves : factures d’entretien, devis, photographies, rapports techniques… autant d’éléments qui permettent de démontrer que le bien ne peut pas être qualifié de vétuste.

    • Argumentation technique/juridique : rappeler le principe de réparation intégrale et, si nécessaire, la jurisprudence récente qui limite l’usage automatique de la vétusté. Malgré qu’un expert de sinistré ne soit pas un conseil juridique, celui-ci doit pouvoir appuyer ses dires sur des arguments juridiques incontestables.

Un rôle de garde-fou

Sans expertise contradictoire, l’assuré se trouve seul face à un rapport technique souvent difficile à comprendre et à contester. L’expert d’assuré agit alors comme un garde-fou essentiel, permettant de rétablir un équilibre dans la discussion afin d’aboutir à une indemnisation réellement équitable.

Cas concrets et illustrations

Rien n’explique mieux la portée de la vétusté qu’un exemple concret. Voici trois situations courantes rencontrées lors d’expertises :

Cas n°1 : la toiture sinistrée

Un incendie détruit une toiture estimée à 50.000 € pour un remplacement complet.

  • L’expert de compagnie retient 45 % de vétusté.

  • En vertu du seuil contractuel de 30 %, seuls 15 % sont réellement déduits, soit 7.500 €.

  • Après intervention de l’expert EAB, en valorisant les travaux d’entretien récents (nettoyage, remplacement de tuiles), la vétusté retenue est ramenée à 30 %.
    Résultat : l’assuré récupère 7.500 € supplémentaires.


Cas n°2 : la chaudière mazout

Une chaudière de 20 ans, bien entretenue mais techniquement dépassée, est rendue inutilisable par un dégât des eaux.

  • L’assureur applique 60 % de vétusté.

  • Sans contestation, l’indemnité couvre à peine la moitié du coût de remplacement.

  • L’expertise contradictoire démontre que, grâce à l’entretien annuel, la durée de vie restante est en réalité de 25 ans.
    La vétusté retenue tombe à 40 % : gain de plusieurs milliers d’euros pour l’assuré.


Cas n°3 : les équipements électriques

Un court-circuit endommage des installations électriques anciennes mais encore fonctionnelles.

  • L’expert de compagnie propose une indemnisation en valeur d’usage uniquement, en invoquant l’obsolescence.

  • Or, la jurisprudence rappelle que la vétusté ne peut pas justifier une réduction mécanique si le dommage est sans rapport avec l’âge du bien.
    Après discussion contradictoire, l’indemnisation est recalculée en valeur à neuf, évitant une perte estimée à plus de 10 000 €.


Ces exemples montrent que la frontière entre vétusté justifiée et déduction abusive est souvent ténue. Et c’est précisément dans cet espace d’interprétation que l’accompagnement d’un expert d’assuré prend tout son sens.

Conclusion : Vigilance et Accompagnement

La vétusté n’est pas qu’une donnée comptable : c’est une notion technique, juridique et contractuelle qui peut profondément influencer le montant de l’indemnité après sinistre. Mal comprise ou appliquée mécaniquement, elle expose l’assuré à des pertes financières importantes.

En Belgique, le seuil de 30 % prévu par les contrats habitation protège partiellement les particuliers. Mais au-delà, tout dépend de la manière dont la vétusté est évaluée, justifiée et défendue. C’est précisément là que peuvent naissent les divergences… et que l’intervention d’un expert indépendant tel que le bureau d’Expertises EAB peut faire toute la différence.

Chaque dossier doit être analysé dans son contexte : l’âge du bien, son état d’entretien, les clauses contractuelles, la jurisprudence applicable. Sans cette lecture fine, l’assuré risque d’accepter une réduction injustifiée de plusieurs milliers d’euros.

Chez EAB, nous considérons que la vétusté n’est jamais un chiffre isolé. C’est un élément à examiner, à discuter et à mettre en perspective dans une expertise contradictoire. Notre mission est d’assurer que l’indemnisation reflète une réparation équitable, et non un simple barème appliqué par défaut.

Leader belge de l’expertise pour le compte des sinistrés

Expertises EAB est l’expert des sinistrés. Nous prenons la défense des assurés sinistrés face aux compagnies d’assurance en Belgique et au Luxembourg.

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