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Catastrophes naturelles : la couverture des sinistres liés à la sécheresse

La portée des garanties catastrophes naturelles des compagnies assurance est clarifiée

Loi sécheresse : des clarifications

Nous vous informions l’an passé du double recours (suspension et annulation) intenté par Assuralia, la fédération des assureurs, et plusieurs compagnies d’assurance, à l’encontre de la « Loi Sécheresse » adoptée en octobre 2021. Voir notre article Loi sécheresse : Assuralia recalée par la Cour Constitutionnelle.

Le recours en suspension avair rapidement été balayé par la Cour Constitutionnelle. Restait donc à se prononcer quant à celui visant son annulation pure et simple.

dessication des sols et catastrophe naturelle belgique

Qu’est-ce que la loi sécheresse ?

En matière d’assurance belge, la Loi relative aux assurance du 4 avril 2014 règle la question des catastrophes naturelles (articles 124 à 132).

L’article de loi adopté le 29 octobre 2021 tend à interpréter la loi sur les catastrophes naturelles concernant l’aspect spécifique de la sécheresse. Son esprit est de faciliter la couverture par les compagnies d’assurance des sinistres liés à la sécheresse. Bien évidemment, cela ne plait pas aux compagnies d’assurance.

Sécheresse ou dessication ?

Le terme adéquat est la dessication des sols. Le terme dessication signifie l’action de rendre sec ce qui précédemment ne l’était pas. En l’occurrence, l’assèchement des couches souterraines et profondes des sols jouxtant ou placés sous les biens immeubles.

Un enjeu de taille pour les assureurs comme pour les sinistrés

Depuis une dizaine d’années, les sols de plusieurs régions sont touchés par la sécheresse. Cette sécheresse, ou dessication des sols, induit d’importants mouvements des sols et entraine au mieux d’importantes fissures, et au pire de graves problématiques de stabilité des immeubles. En d’autres termes, les bâtiments touchés risquent de s’effondrer.

Au vu de l’importance des indemnités en jeu, on comprend facilement l’intérêt que suscite cette question, tant pour les assureurs que les propriétaires de bâtiments sinistrés.

Les compagnies d’assurance visaient ici l’annulation pure et simple de la loi sécheresse.

2005 : les catastrophes naturelles assurées par défaut (pour les particuliers)

En 2005, la loi relative aux assurances est modifiée afin que les dommages liés aux catastrophes naturelles, en ce compris l’assèchement des sols, soient couverts par les polices d’assurance incendie. C’est ainsi que les dommages causés par une catastrophe naturelle ont été ajoutés aux garanties des contrats d’assurance habitation des particuliers. Les conditions nécessaires à la couverture des dommages étaient alors que le sol ne s’affaisse ni subitement, ni exclusivement par l’effet d’un phénomène naturel. De ce fait, il était primordial de prévoir que tous les affaissements dus au moins partiellement à un phénomène naturel soient indemnisés.

La modification de cette loi avait alors été justifiée sur la base suivante :

« La condition liée à la soudaineté du mouvement de terrain est abandonnée, car elle peut prêter à confusion. En effet, les glissements ou affaissements de terrain peuvent résulter d’un processus lent et invisible. Cette disposition est sans préjudice de la responsabilité des pouvoirs publics ou des citoyens de prendre les mesures de protection nécessaires en cas de glissements ou affaissements visibles ou connus. L’essentiel est de couvrir tous les glissements ou affaissements dus en tout ou partie à un phénomène naturel. »

L’article 84 de la Constitution

L’interprétation des lois par voie d’autorité n’appartient qu’à la loi.

Les travaux préparatoires

Lors des travaux préparatoires à la disposition attaquée, il fut mentionné :

« La sécheresse de ces dernières années ne reste pas sans conséquences. Le nombre d’habitations bâties sur un sol argileux et gravement endommagées en raison de la sécheresse des sous-sols ne cesse d’augmenter. Le réchauffement climatique est en partie responsable des habitations qui s’écroulent en raison de la sécheresse. Les habitations bâties sur un sol argileux sont davantage touchées, car ce type de sol se contracte et s’affaisse. On observe également ce phénomène dans des régions aux sous-sols comparables, par exemple aux Pays-Bas.

Le problème pour les personnes lésées est que les compagnies d’assurance refusent parfois de couvrir les dommages, obligeant ainsi les propriétaires concernés à s’acquitter d’une facture salée.

Qui détermine l’origine du phénomène d’affaissement ou glissement de terrain ?

Les assureurs ont toute latitude pour déterminer si les dommages sont dûs à un phénomène naturel ou d’origine humaine.

Bien évidemment, certaines compagnies d’assurance exploitent cette liberté d’interprétation. Ces sociétés d’assurance affirment notamment que la contraction du sol ne constitue pas un affaissement. Elles soutiennent en effet que la contraction de l’ensemble du sous-sol ne représente pas un mouvement de masse importante de terrain, tel que le prévoit l’article 124, § 1er, d), de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances. Leur position consiste à prétendre qu’il doit être question d’un mouvement d’une masse extraordinaire de terrain pour que la condition légale soit rencontrée.

D’autre part, les compagnies d’assurance s’appuient sur l’idée que la sécheresse n’est en rien corrélée à la contraction du sol (absence de lien causal).

Le législateur devait clarifier

Ci-dessous l’article 124, § 1er, d) litigieux de la loi du 4 avril relative aux assurances :

soit un glissement ou affaissement de terrain, à savoir un mouvement d’une masse importante de terrain qui détruit ou endommage des biens, dû en tout ou en partie à un phénomène naturel autre qu’une inondation ou un tremblement de terre. ’.

Constatons que cet article est effectivement sujet à interprétation et génère une insécurité juridique sans équivoque. Une loi interprétative (qui tranche et empêche toute interprétation libre) était de ce fait indispensable.

Et celle-ci se devait de spécifier que toute contraction du sol du fait de la sécheresse constitue un affaissement de terrain, relevant de facto du champ d’application de la loi actuelle.

La loi qui change tout

Le 29 octobre 2021 était promulguée la loi interprétative de l’article 124, § 1er, d), de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances.

Cette loi, publiée au Moniteur Belge en date du 23 février 2023, a permis de clarifier la question de la prise en charge par les compagnies d’assurance des dommages dûs à la sécheresse d’une façon très claire, comme suit en son article 2 :

L’article 124, § 1er, d), de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances doit être interprété en ce sens qu’il y a notamment lieu de comprendre par « mouvement d’une masse importante de terrain qui détruit ou endommage des biens, dû en tout ou en partie à un phénomène naturel autre qu’une inondation ou un tremblement de terre » toute contraction d’une masse importante de terrain due en tout ou en partie à une période de sécheresse prolongée, qui détruit ou endommage des biens.

L’assuré est protégé et rassuré

En définitive, les compagnies d’assurance sont contraintes de couvrir tous les dommages liés à la dessiccation des sols, ou plus communément au phénomène d’assèchement des sols, tant chez les particuliers qu’en entreprise (pour autant que cette garantie soit bien reprise au sein des garanties de ces derniers).

Particularité : retour en arrière possible

Votre compagnie d’assurance a refusé de couvrir les dommages survenus à votre immeuble du fait de la sécheresse ? La loi du 29 octobre 2021 vous permet de ré-ouvrir votre vieux dossier et forcer la couverture des dommages, pour autant que celui-ci ne soit pas antérieur au 1e novembre 2014 (prise d’effet de la loi du 4 avril 2014).

Des pistes de solution

D’importantes fissures sont apparues dans votre immeuble ?

Vous ne savez pas comment être indemnisé pour vos dommages, et encore moins comment évaluer vos dommages ?

Prenez contact avec Expertises EAB. Nous vous aiderons volontiers car telle est notre vocation.

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